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L'Édito

Vous n’avez rien contre la jeunesse ?

L'Édito

Vous n’avez rien contre la jeunesse ?

Chères spectatrices, chers spectateurs,

On l’espère, car notre programme de la semaine la célèbre. Entre la soirée de clôture du Festival Smells Like Teen Spirit, la reprise sur copie neuve de Breaking Away, et les projections du Festival Faire un Film en 48h (FFF48H), la phrase de la petite vendeuse des Cahiers du Cinéma qui se fait rembarrer par Belmondo dans A Bout de Souffle sonne juste. Nous, nous n’avons rien contre la jeunesse et sommes bluffés par le talent précoce de Damien Chazelle (33 ans), réalisateur de First Man et de Whiplash, séduits par la vision qu’en donne Debra Granik dans Leave no trace, et réjouis du culot de deux jeunes policiers Noirs, Flic de Beverly Hills ou BlacKkKlansman.

Après nous avoir régalés de films sur la jeunesse, le Festival Smells Like Teen Spirit se termine en cauchemar mercredi soir. Pour fêter la nuit d’Halloween, nous verrons Freddy-les Griffes de la nuit à 20h et Scream à 21h45. Il ne va pas être facile d’aller se coucher après deux juvéniles et terrifiants Wes Craven ! Samedi dernier, l’avant-première de Breaking Away avait ouvert ce festival. C’est un euphémisme de dire que la reprise sur copie neuve de ce film culte, invisible depuis 40 ans en France, est attendue. Dans un bled de l’Indiana, un fils de prolo qui traîne avec ses potes, va défier sur son vélo des jeunes gens issus de classes plus favorisées. Réalisé par Peter Yates, Breaking Away obtint l’Oscar du Scénario en 1979, couronnant le travail du dramaturge Steve Tesich. D’origine Serbe, il écrivit une douzaine de pièces de théâtre, des romans (dont Price et Karoo, publiés en français aux éditions Monsieur Toussaint Louverture) et quelques scripts, dont celui de Georgia d’Arthur Penn et l’adaptation du Monde selon Garp, de George Roy Hill, d’après John Irving. Après le succès de Breaking Away, il travailla à deux reprises pour Yates, mais mourut prématurément à 53 ans, en 1996. Grands faiseurs de polars (on citera bien sûr Bullitt), le réalisateur a touché à pas mal de genres, et s’essayait ici à la comédie dramatique et sociale avec brio. Si l’on écrit que Breaking Away est un teen movie issu du Nouvel Hollywood, les cinéphiles nous comprendront ; ils apprécieront aussi que ce soit drôle, touchant et engagé, comme une « vélorution ».

Le cinéma nait souvent dans l’urgence, et réaliser un court-métrage en deux jours est une sacrée gageure pour de jeunes cinéastes. Cette démarche incongrue s’est transformée en un concours annuel, organisé par le Festival Faire un Film en 48h. Lundi et mardi soir, quatre séances permettront au public de découvrir les films de l’édition 2018, et de prendre part au vote. Rappelons que le défi consiste à se voir imposer des contraintes vendredi soir, afin d’écrire, de produire, de tourner et de monter une œuvre originale de quelques minutes, à remettre aux organisateurs du festival dimanche, avant 19h. Un pur rush! Ces projections seront aussi l’occasion aussi de rencontrer les équipes qui sont parvenues à tenir ce rythme infernal. Dont elles sont sorties exsangues, mais heureuses et fières.

Tout comme son Whiplash, le First Man de Damien Chazelle demeure évidemment à l’affiche. Très documenté et parfaitement maîtrisé, ce biobic de Neil Armstrong entre 1961 et 1969 nous fait partager le quotidien, les défis, les drames, les espoirs, les doutes et le succès final du premier homme qui a foulé le sol lunaire. Si la conquête – dure, longue et périlleuse – structure le film, il aborde aussi la vie privée du héros ainsi que le contexte troublé de ces années 60. Ryan Gosling incarne brillamment la détermination buttée de cet homme dont la lune est l’unique horizon et Claire Foy, son épouse à l’écran, lui donne la réplique avec piquant, justesse et humanité.

Non sans vous rappeler que les films cités en début de lettre gardent quelques séances, terminons avec l’Enfance de l’Art, puisque nous n’avons rien contre la jeunesse, surtout si elle est cinéphile. Mercredi à 10h30, les tout-petits suivront les trois charmants dessins animés réunis dans 10, 11, 12… Pougne le Hérisson. Jeudi à 10h30 et dimanche à 14h, nous partirons tous « over the rainbow » avec Dorothy pour rencontrer Le Magicien d’Oz, chef d’œuvre absolu de Victor Fleming (avec la collaboration d’autres grands réalisateurs non crédités, tels King Vidor, Gorges Cukor, Richard Thorpe et Mervyn LeRoy ; rien que ça !).

Bonne jeune semaine.

Isabelle Gibbal-Hardy et l’équipe du Grand Action.