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L'Édito

Grandes illusions.

L'Édito

Grandes illusions.

Chères spectatrices, chers spectateurs,

Le cinéma, cet art de l’illusion, sait aussi les mettre en scène. The Big Short raconte l’illusion de la finance toute puissante et pourtant si faillible, Le Pont des Espions, la fable du monde libre face au communisme, et Joe Hill, les illusions perdues des hobos américains. Mais notre titre fait aussi référence à La Grande Illusion, chef d’œuvre de Jean Renoir, que le Ciné-Club des Ecoles nous propose de revoir jeudi à 20h30, en présence de l’historien Dimitri Vezyroglou. Le reste de notre programme fait la part belle au retour du Cycle Steven Spielberg, et laisse aussi une séance – la dernière – aux Yeux Brûlés, de Laurent Roth.

« Pour un homme du peuple, c’est terrible de mourir à la guerre ; pour vous et moi, c’est plutôt une bonne solution », dit le Capitaine de Boëldieu (Pierre Fresnay) à son geôlier, le commandant Von Rauffenstein (Erich Von Stroheim), qui lui répond « Je l’ai manquée… ». (dialogues +++ de Charles Spaak). Pendant la Première Guerre Mondiale, deux aviateurs aristocrates se font face. L’un est français et prisonnier, l’autre, allemand, est devenu gardien depuis que ses blessures l’empêchent de repartir au combat. Couvert par leur officier, deux autres soldats français, l’un ouvrier, l’autre fils de banquier juif, en profitent pour s’évader de la forteresse. Réalisé à la veille du second conflit, La Grande Illusion est bien un film de classe – un thème cher à Renoir – et non un film de guerre. A travers les portraits du microcosme d’un camp de prisonniers, puis dans les rapports entre les deux officiers nobles et les deux fuyards plébéiens (Gabin, Dalio), Renoir fait un état du monde et des rapports sociaux qui le régissent. Mais on ne se refait pas et, s’il dénonce le nationalisme et l’antisémitisme, Renoir demeure toujours positif lorsqu’il pose son regard sur ses personnages. Reste à savoir ce qu’est La Grande Illusion ? Celle des soldats qui pensaient que cette guerre serait courte ? Qu’elle serait la dernière ? Ou bien le titre évoque t-il les rapports humains qui ne sont qu’illusions ? Nous en reparlerons avec l’historien du cinéma Dimitri Vezyroglou lors de la séance de jeudi du Ciné-Club des Ecoles, et poursuivrons la conversation autour d’un verre au grand Bar.
Nous vous avons déjà largement parlé de The Big Short, adapté du best seller de Michael Lewis. En suivant quelques personnages haut en couleur et interprétés par des stars (Bale, Gosling, Carrel, Pitt), le film d’Adam McKay nous ramène aux sources de la crise des subprimes. C’est brillant et enlevé, engagé et éclairant, filmé comme un documentaire et pourtant diablement écrit. Au grand jeu du « qui veut gagner des milliards ? », les traders et boursicoteurs qui ont anticipé la catastrophe à venir vont tenter de plumer les banquiers trop cupides/stupides. Si les mécanismes financiers, parfois complexes, ne sont pas toujours faciles à suivre, les explications données avec humour permettent de comprendre certaines arcanes ; la finalité, elle, reste simple : s’enrichir.

Quoi que touche l’inépuisable Steven Spielberg, il le transforme en or. Ainsi, lorsqu’il s’attaque au thriller d’espionnage à la Le Carré, ça nous donne Le Pont des Espions. Avec cette générosité qui caractérise son cinéma, il nous emmène dans un univers, ici le Berlin de la Guerre Froide, et invente (ou plutôt interprète puisque que l’avocat joué par Hanks a vraiment existé) des personnages toujours complexes et attachants. Nous en reverrons certains lors du Cycle qui lui est consacré. De E.T., le merveilleux extraterrestre, au traqueur traqué de Minority report, du jeune Albert et son Cheval de Guerre, à Célie et son combat dans la Couleur Pourpre, de Hook, le Capitaine Crochet aux visiteurs de Jurassic Park et aux baigneurs des Dents de la Mer, nous retrouverons avec plaisir tout le petit monde de Spielberg.

Avant de conclure, redisons qu’il vous reste une dernière séance pour voir Les Yeux Brûlés, l’étonnant témoignage sur la guerre et le souvenir de Laurent Roth, et finissons avec l’Enfance de l’Art, pour une sélection de courts-métrages du marin à biceps. Ce sera dimanche, Popeye et les 1001 Nuits, de Dave Fleischer. 

Et puis bonne semaine, même sans David Bowie. So long Ziggy et Major Tom, écoutons votre dernier disque, et let’s dance

Isabelle Gibbal-Hardy et l’équipe du Grand Action.