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L'Édito

Le cinéma, un art féminin ?

L'Édito

Le cinéma, un art féminin ?

Chères spectatrices, chers spectateurs,

On a beaucoup glosé sur la faible représentation féminine au dernier festival de Cannes (une seule réalisatrice en compétition officielle). En réponse à cette supposée misogynie de la famille du cinéma, le Grand Action consacre son écran à une soirée exceptionnelle, dont les femmes – et leur corps – sont les vedettes. Ainsi Marina Abramovic, scénographe et performeuse à laquelle Matthew Akers a consacré un formidable documentaire, The Artist is Présent. Le film sera projeté lundi à 20h, en présence d’autres femmes qui utilisent leur corps comme une arme politique. Le reste de la programmation est plus testostéroné, avec toujours le somptueux mâle Robert Redford, hyper irrésistible dans The Great Gatsby, et les autres films du Cycle que nous lui consacrons. Egalement plutôt masculin, notre Cycle l’Empreinte du Territoire, qui célèbre les grands espaces de l’Ouest sauvage. Et puis vous retrouverez quelques séances de rattrapages pour voir les films des précédentes semaines que, filles ou garçons, vous auriez pu rater.

Marina Abramovic est une drôle d’artiste. Elle soumet son corps à de multiples épreuves pour interroger le monde sur ce qu’est l’art. Après s’être flagellée, gelée, lacérée, elle a tenté au prestigieux Moma de New York une expérience dérangeante. Immobile à une table, elle proposait au public de passer un moment muet face à elle. Autour de cette performance, le documentariste Matthew Akers a réalisé un film sur l’étonnant travail de Marina Abramovic : The Artist is Present. Pour compléter cette soirée consacrée au Corps Activiste, un débat suivra la projection. Loubna Meliane et Nathalie Vignes, membres des FEMEN viendront évoquer leur engagement dans ce groupe politique de femmes qui se servent de leur nudité comme d’une arme politique. Elles seront accompagnées de Gaël Depauw, performeuse transsexuelle, pour nous éclairer sur les nouvelles formes de contestation qui mènent à l’émancipation des femmes. A propos d’émancipation, citons ici l’Enfance de l’Art qui, dimanche à 14h, nous propose le tout premier film réalisée par une Saoudienne. Dans le formidable Wadjda, Haifaa Al Mansour nous plonge dans le quotidien d’une jeune fille qui veut juste faire du vélo. Sauf qu’au pays des Saoud, les femmes n’ont pas à vouloir quoi que ce soit.

Bien qu’à l’honneur, les dames ne bouderont pas leur plaisir de voir le Beau Redford briller à l’écran. D’abord aux côtés de Mia Farrow dans The Great Gatsby, version 1974 de Jack Clayton, mais aussi dans le Cycle que nous consacrons à ce grand monsieur. Notre cycle n’est certes pas exhaustif puisque Redford apparaît dans plus de 50 films et en a réalisé une dizaine. Et c’est toujours un plaisir de revoir Bob en espion, qu’il soit traqué dans Les Trois Jours du Condor, de Sydney Pollack, ou en préretraite dans Spy Game, de Tony Scott. Nous le suivrons aussi en milliardaire séducteur dans Proposition Indécente, d’Adrian Lyne, en militaire emprisonné dans Le Dernier Château, de Rod Lurie, et en jeune homme politique dans Votez McKay, de Michael Ritchie.

Hasard de la programmation, Redford est aussi Jeremiah Johnson, le mystérieux cowboy de Sydney Pollack, l’un des films de notre autre cycle l’Empreinte du Territoire. Dans cet hommage aux grands espaces, on pourra explorer Le Nouveau Monde de Terrence Mallick, servir d’Appât avec Antony Mann, partir à la recherche de La Prisonnière du Désert ou combattre Les Cheyennes, deux westerns signés John Ford. Il est aussi conseillé de suivre la recommandation des frère Coen et de convenir qu’ici, c’est No Country for Old Men, ce qu’auraient du se dire les copains de Délivrance, de John Boorman.

Entre toutes ces séances, s’en intercalent certaines de nos films des précédentes semaines : Promised Land, plaidoyer écolo de Gus Van Sant, Django Unchained, western déchaîné de Tarantino, Khroustaliov, ma voiture !, errance subversive d’Alexeï Guerman, Spring Breakers, film pop trash d’Harmony Korine, et César doit Mourir, chef d’œuvre des Frères Taviani, qui font jouer Shakespeare à des taulards. Ajoutons à cette liste une projection spéciale de Hugo Cabret, le très joli conte de Noël de Martin Scorsese (oui, on sait, c’est pas vraiment de saison), et celle de l’Enfance de l’Art, déjà citée. Mais pour Wadjda, mieux vaut deux fois qu’une.

Bonne semaine.

Isabelle Gibbal-Hardy et l’équipe du Grand Action