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L'Édito

Fragments du discours amoureux.

L'Édito

Fragments du discours amoureux.

Chères spectatrices, chers spectateurs,

Comme l’indique ce très beau titre emprunté à Roland Barthes, la semaine du Grand Action sera placée sous le signe de l’amour, pour saluer la sortie nationale de Two Lovers, le nouveau film de James Gray. Mais attention, pas de l’amour béat et romantique : de l’amour complexe, conflictuel, voire meurtrier, comme dans la Vérité sur Bébé Donge que propose mardi notre Club Positif du mois. Henri Decoin a soigneusement adapté en 1951 ce roman très noir de Simenon, où une jeune femme (Danièle Darrieux) empoisonne son mari (Jean Gabin). La construction en flash-back, la rigueur de la mise en scène et l’interprétation impeccable de deux monstres sacrés du cinéma français rendent parfaitement l’atmosphère typique de l’auteur et permettent à Decoin de signer l’une de ses grandes réussites. Ce n’est donc pas un hasard si nos amis cinéphiles de Positif ont retenu cette œuvre désespérée, sur laquelle Claude Gauteur se fera un plaisir de débattre après la projection de mardi à 20h.

Avec Two LoversJames Gray change de registre. Little Odessa, puis The Yards et We Own the Night (nous programmons les deux derniers cette semaine), l’avaient imposé comme un brillant héritier d’un Scorsese, prenant un noir plaisir à plonger dans l’univers délétère et violent du crime organisé. Son dernier film, construit autour de son acteur fétiche Joaquin Phoenix, est un drame romantique ; l’histoire d’amour(s) d’un jeune homme perturbé qui hésite entre deux femmes, magnifiquement castées : la brune et sage Vinessa Shaw versus la blonde et bouillonnante Gwyneth Paltrow. On retrouve le Brooklyn crépusculaire qu’affectionne le réalisateur, on découvre une nouvelle nuance du talent de Joaquin Phoenix, et on constate que Gray maîtrise parfaitement la science du filmage. Dans cette réalisation à contre emploi, il fait preuve d’une délicatesse qui évoque les films intimistes de Mike Nichols ou de Cassavetes.

Surfant sur ce thème de la complexité amoureuse, nous avons ressorti quelques petites perles de derrière les bobines pour concocter un petit festival « Manège à Trois ». Jeudi, le pétillant Ernst Lubitsch donnera sa Sérénade à Trois ; samedi, Georges Cukor révèle les Indiscrétions du trio Hepburn-Grant-Steward ; lundi, Woody Allen arbitre un drôle de match amoureux gagné (ou perdu ?) par Match Point tandis que John Huston nous égare dans le désert des DésaxésFrançoisJules et Jim termineront la semaine mardi.

Que tous ces déboires amoureux ne fassent pas oublier le reste de notre programme, à commencer par Fenêtre sur Cour, l’impeccable huis clos hitchcockien où les fenêtres parlent aux voyeurs, ni L’Escalier Interdit, la descente aux enfers d’une jeune enseignante vue par Robert Mulligan. Quant au jeune public, l’Enfance de l’Art lui propose d’écouter la Prophétie des grenouilles, remarquable film d’animation de Jacques-Rémy Girerd, mercredi à 14.

Bonne semaine.

Isabelle Gibbal-Hardy et l’équipe du Grand Action