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L'Édito

Faites l’amour, pas la guerre.

L'Édito

Faites l’amour, pas la guerre.

Chères spectatrices, chers spectateurs, 

Comment va L’Amour au XXIe siècle ? Il est compliqué, et un programme de courts-métrages instigué par de brillants jeunes gens nous en montre plusieurs facettes. Mais il n’a pas disparu, pas plus que la guerre, d’ailleurs, qui sévit aux portes de l’Europe. Jungle Rouge, notre sortie de la semaine, évoque celle des FARCS qui ravagea la Colombie, et le Ciné-club Louis Lumière nous propose d’en voir certaines conséquences à travers Les Dimanches de Ville-d’Avray, film mythique de Serge Bourguignon, réalisé en 1962 et projeté en sa présence mercredi à 20h. D’autres ciné-clubs rythmeront notre semaine, toujours menée par le cycle Claire Denis, qui sut, dans Beau Travail, filmer les guerriers avec amour. 

À tout seigneur, tout honneur, débutons donc par la visite, mercredi à 20h, de Serge Bourguignon, toujours alerte malgré le poids des ans. A l’invitation du Ciné-club Louis Lumière, il a la gentillesse de venir nous présenter Les Dimanches de Ville-d’Avray, adaptation d’un roman de Bernard Eschassériaux qui raconte l’étrange et scandaleuse amitié entre un pilote de guerre amnésique et une jeune orpheline. Passé par l’école du documentaire, Serge Bouguignon fut mystérieusement boudé par la Nouvelle Vague. Mais, après avoir obtenu la Palme du court-métrage en 1960 pour Le Sourire, il décrocha l’Oscar du meilleur film étranger en 1962 pour Les Dimanches de Ville-d’Avray. Comptez les réalisateurs français qui alignent ces deux trophées sur leur étagère, et venez rendre un légitime hommage à l’un d’eux, en découvrant un film singulier et sensible, dont nous débattrons après la projection.  

Carlos Tello, notre ami universitaire, spécialiste de littérature comparée et cinéma, et par ailleurs instigateur du ciné-club Image & Parole, nous propose deux séances amazoniennes. Il animera la première, vendredi à 20h, à la suite de La Fièvre, de Maya Da-Rin, où une jeune fille doit quitter Manaus pour suivre ses études à Brasilia. Le lendemain, toujours à 20h, nous verrons le documentaire Les Hyperfemmes, où Leonardo Sette, Carlos Fausto et Takumã Kuikuro ont filmé un rituel de deuil féminin dans le Mato-Grosso. Le dernier du trio échangera ensuite avec Carlos, Solange Bouffay et vous, cher public. 

Si vous venez souvent au Grand Action, vous avez sans doute déjà croisé Adrio Guarino, un jeune homme débordant de cheveux, d’idées, de sourire et d’énergie qui, à la Fémis, prépare l’avenir de la distribution. Il s’est déjà lancé dans le job, et a réuni un programme de courts-métrages – L’Amour au XXIe siècle – qui sera projeté lundi et mardi à 21h, en présence de certains des cinéastes en devenir qui ont exploré le sujet. Ainsi Paul Rigoux a imaginé Le Déclin d’Antoine, tandis que Lucas Besnier et Raphael Dulery ont repris la punch line giscardienne pour titrer Le Monopole du cœur. Reuben Bocobza a suivi l’amour très contemporain de Yannick et Pauline, tandis que Sacha Teboul s’est attaché au Drap bleu. Vous aimez l’amour ? Vous n’avez rien contre la jeunesse ? Alors venez au cinéma ! 

Autre sujet. A la fin des années 40, l’insolente richesse des grands propriétaires colombiens provoque des révoltes paysannes, d’inspiration communiste, qui furent impitoyablement réprimées. Les FARCS (Forces Armées Révolutionnaires de Colombie) puisent leur légitimité de cette injustice sanglante. Mais le mouvement s’égare vite dans des guerres fratricides. L’émergence du narcotrafic dans les années 80 accélère le processus délétère et plonge le pays dans la violence aveugle, assassinats et prises d’otages. En 2008, la mort de Raùl Reyes, emblématique porte-parole des FARCS dans un bombardement de l’armée colombienne épaulée par la CIA, marque un tournant de l’histoire et lance le sujet de Jungle Rouge. En faisant animer par Zoltan Horvath les comédiens qu’il filme, Juan José Lozano évoque ce moment qui aboutira à la paix, une grosse décennie plus tard. A partir du journal de Reyes, mélange de quotidien et de romanesque révolutionnaire, il crée un drôle d’objet filmique, où l’enfer vert est rouge de sang. Une vraie curiosité, et un grand choc cinématographique. 

Restent au programme Beau Travail et le cycle Claire Denis, ainsi que tous les anciens succès dont les affiches sont visibles en bas de lettre. Lettre que clôt, as usual, l’Enfance de l’Art. Mercredi à 14h30, crachons du feu avec Zébulon le Dragon, et dimanche à 14h, partons pour trois Courtes Escapades, dont un petit film de Jacques Rozier. 

Belle semaine.

Isabelle Gibbal-Hardy et l’équipe du Grand Action