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L'Édito

Cinéma de nuit.

L'Édito

Cinéma de nuit.

Chères spectatrices, chers spectateurs,
Même s’il a besoin de lumière pour impressionner la pellicule et éclairer ses stars, le cinéma se délecte de la nuit. Cette quotidienne disparition du soleil a été célébrée par des nombreux réalisateurs, à commencer par Michael Mann, virtuose du nocturne, comme le montre son Cycle. Nous en parlions déjà la semaine passée. Hacker, son dernier film, en donne encore la preuve en enchaînant des plans nocturnes d’une saisissante beauté. Mais d’autres cinéastes ont aussi célébré la nuit et parfois de façon frontale. Ainsi Les Nuits de la Pleine Lune, manifeste rohmérien des années 80, qui sera projeté mardi 7 avril dans le cadre d’un Ciné-Club Louis Lumière. Le suisse Renato Berta, star des chefs-opérateurs, viendra nous livrer ses secrets nocturnes lors du débat qui suivra la projection. 

Directeur de la photo pour Resnais, Malle, De Oliveira, Chéreau, Techiné, Gitaï, Guedigian, Tanner ou Vecchiali, Renato Berta fait partie des grands noms du petit monde de la lumière au cinéma. Les Nuits de la Pleine Lune est – à notre connaissance – la seule collaboration de Berta avec Rohmer, ce vieux cinéaste de la jeunesse. Ces nuits, ce sont celles de Louise, à laquelle Pascale Ogier avait merveilleusement donné vie, juste avant de perdre très bêtement la sienne. La vie d’alors, en ces années 80, était insouciante, joueuse, séductrice. Tout comme Louise qui jongle avec les sentiments et les amants, passant d’une fête à une autre, et d’un cœur au suivant. Rarement une époque a été aussi finement saisie que dans ce film d’une grâce inouïe. Tchéki Karyo et Fabrice donnent la réplique à Pascale Ogier, et se retrouvent aux 120 Nuits, éphémère boîte punk parisienne, dont gardent un souvenir ému tous ceux qui l’on fréquentée. Après la projection et avant le cocktail qui prolongera ce Ciné-Club Louis Lumière, Renato Berta nous racontera sa collaboration avec Rohmer, et comment ils ont si bien su attraper l’époque au bond, et de nuit.

Dans Hacker, Michael Mann saisit aussi l’air du temps, qui est devenu plus nettement moins insouciant et beaucoup plus anxiogène. Par de vertigineux travellings qui suivent les réseaux de l’information, il nous fait toucher l’extrême fragilité de notre monde connecté. C’est par un trou de souris numérique qu’un pirate informatique malfaisant entre dans les systèmes d’une centrale nucléaire ou de la bourse de New York pour tout faire sauter. Si ses méthodes et sa bande de tueurs sont radicales, son but demeure obscur. Et il faudra tout le talent et le culot d’un aréopage hétéroclite pour tenter d’en venir à bout. Parmi les membres de l’escouade, un Hacker de génie, que l’on sort de prison pour l’occasion, un brillant contre-espion chinois, sa charmante sœur, par ailleurs ingénieure réseau, une dame du FBI marquée par le terrorisme, et un agent fédéral un peu naïf chargé de surveiller l’extradé du trou. Toute la bande va courir le sud-est asiatique pour contrer les sinistres projets du bandit numérique. Mené avec l’efficacité d’un James Bond, et toute la maîtrise de Mann, Hacker est un modèle de film d’action, ponctué de quelques scènes d’anthologie, la plupart filmée de nuit.
Car la nuit va bien à Mann, qui en a tiré les plus beaux moments de ses films. On pourra en revoir quelques uns lors du Cycle que nous lui consacrons. Après avoir gagné sa vie comme scénariste de télévision, il débute au cinéma en 1981 avec Le Solitaire, où James Caan interprète un gangster en quête de repentance. Michael Mann connait son plus grand succès 14 ans plus tard avec Heat, où il met en scène un homérique duel à distance entre Al Pacino et Robert De Niro. Il enchaîne avec Révélations, un thriller politique qui dénonce les embrouilles des multinationales du tabac, puis Ali, un classique mais très convainquant biopic sur le célèbre boxeur qu’incarne Will Smith. Juste avant Hacker, il avait signé le dernier film de ce cycle. Public Enemies est un hommage à l’âge d’or du film noir inspiré de l’histoire de John Dillinger, un gangster des années 30 qu’incarne Johnny Depp.

Après quelques semaines agitées, et le départ de nos amis Russes qui ont ambiancé la dernière semaine, l’Enfance de l’Art revient ce dimanche, en beauté et en burlesque, puisqu’avec les Nouvelles (més)aventures d’Harold Lloyd.

Bonne semaine

Isabelle Gibbal-Hardy et l’équipe du Grand Action.