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L'Édito

Inventer son cinéma.

L'Édito

Inventer son cinéma.

Chères spectatrices, chers spectateurs,

Nous l’avons déjà écrit, chaque film est un prototype. Lors de sa fabrication, le réalisateur imagine son propos, peaufine son style, s’entoure de personnes de confiance et s’appuie sur ses expériences passées pour faire émerger son cinéma. Si celui de Pat O’Neill, que nous découvrirons jeudi et vendredi, s’inscrit dans la sphère expérimentale, celui de Wes Anderson creuse un sillon très personnel, tant dans sa forme que son fond. Asteroid City, son dernier opus présenté au Festival de Cannes, semble iconique du style qu’il a inventé et que l’on retrouve toujours avec un immense plaisir. Quelques autres événements cette semaine, dont un clin d’œil au cinéma vietnamien avec le Ciné-club Yda de samedi 16h, et une exceptionnelle projection de La Crise, que nous reverrons en présence de Coline Serreau, l’une des pionnières du cinéma féminin invitée pour fêter le Numéro 700 de l’Avant-Scène, lundi à 20h. En fin de lettre, consultez aussi la liste de nos récents succès qui tiennent toujours l’affiche. 

Les soirées de jeudi et vendredi à 20h seront consacrées à ExperimentL.A., qui regroupent deux séances pour découvrir l’étonnant Cinéma de Pat O’Neill. Né en 1939, Pat O’Neill a, en parallèle de son travail dans les effets spéciaux pour les studios hollywoodiens, développé une œuvre singulière à partir des années 60. Un « cinéma composite d’une luxuriante, subtile et incomparable complexité, acide, ironique, halluciné et méditatif ». S’essayant à tous les formats – 16mm, 35mm, numérique…- O’Neill rend souvent hommage à Los Angeles, la ville qui l’a vu naître. Ainsi, jeudi, nous verrons Bump City, son deuxième opus de 1963, et Water and Power, sur un quartier de la cité des Anges ; le lendemain, ce sera Runs Good et Where The Chocolate Mountains, l’un de ses derniers films (2015), qui résume son talent multi-facettes. 

Samedi à 16h, nous partons au Vietnam avec le Ciné-club Yda qui fait connaître le cinéma de beau et long pays. Dans Ròm, Tran Thanh Huy nous entraîne dans la vie des enfants des rues d’Hô Chi Minh-Ville, qui comptent sur le jeu et le hasard pour quitter la misère. La séance sera suivie d’un débat avec le réalisateur.

La célébration du Numéro 700 de l’Avant-Scène se poursuit cette semaine avec La Crise, de Coline Serreau, que nous verrons et dont nous débattrons en sa présence lundi à 20h. Venez nombreux la remercier de sa visite !

Wes Anderson, le plus français des réalisateurs texans, cite volontiers Truffaut, Renoir et toute la variété hexagonale, de Françoise Hardy à Christophe, en passant par Joe Dassin. Réfugié à Paris, ce cinéaste orfèvre demeure néanmoins américain et, même s’il fait parfois des incursions filmiques ailleurs dans le monde (en Inde, à Budapest, en France), il sait scruter la folie des États-Unis à travers son regard pastel. On retrouve dans Asteroid City, son dernier film qui sort ce mercredi, le maniérisme délicat, la tonalité décalée, l’art du contre-pied et la couleur si particulière des films d’Anderson. Il nous plonge ici au cœur des années 50, dans un bled perdu et désertique de l’Amérique profonde, né d’une chute d’astéroïde, et qui, alors qu’il accueille une conférence de jeunes astronomes, voit arriver un visiteur tombé du ciel. Sur ce pitch ubuesque, il construit un récit choral et touchant, où l’on retrouve la clique de Wes : Roman Coppola au scénario, bien sûr, mais aussi sa pléiade de stars potes : Tilda Swinton, Adrien Brody, Edward Norton, tous menés par Jason Schwartzman, inénarrable en veuf et père de famille nombreuse. Face à lui, deux (presque, puisque la première lui avait déjà prêté sa voix) nouveaux venus dans l’univers des contes d’Anderson : Scarlett Johansson, aussi élégante que Grace Kelly, et Tom Hanks, en beau-père revêche. Lundi matin, Wes confiait à une grande radio de service public qu’il aimerait vivre dans Fenêtre sur Cour, sans doute le plus andersonien des films d’Hitchcock. De fait, le côté miniaturiste, présent évidemment dans Asteroid City (précision des cadres et des mouvements de caméra qui auscultent le récit), n’est pas sans évoquer le regard scrutateur qu’Alfred posait sur les appartements de la cour. 

On termine vite en vous rappelant que bien d’autres films peuvent ravir votre semaine, dont Trois milliards d’un coup (Robbery), que présentera le distributeur Marc Olry dimanche à 18h30 et qu’accompagne un cycle Peter Yates. Et hop, deux lignes pour L’Enfance de l’Art, toujours animé par Diane. Elle nous présentera Pachamama, de Juan Antin mercredi à 14h30, et Fritzi, de Beate Völcker dimanche à 14h. 

Belle semaine. 

Isabelle Gibbal-Hardy et l’équipe du Grand Action