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L'Édito

Les géants et les maudits.

L'Édito

Les géants et les maudits.

Chères spectatrices, chers spectateurs,
La semaine dernière, nous évoquions les films maudits (dont certains sont encore à l’affiche). California Dreamin’ en est aussi un, puisque Cristian Nemescu, son jeune réalisateur, est mort avant d’avoir pu en achever le montage. Son film a été retenu par le Ciné-Club Positif de ce mois. S’il avait vécu plus longtemps, Nemescu serait peut-être devenu un géant du cinéma. Dino de Laurentiis, disparu le 11 novembre, en était incontestablement un. Nous rendons cette semaine un modeste hommage à ce flamboyant producteur, en projetant une poignée de quelques 500 films qu’il a signés. Prométhée, lui, était un Titan, mais le fils d’un géant. C’est aussi le nom d’une société de production qui, prométhéenne, croit en l’homme et au talent des jeunes réalisateurs qu’elle défend. Collectif Prod, instigateur de notre rendez-vous des Courts du Grand, offre une soirée carte blanche à Prométhée Productions, qui viendra présenter vendredi soir ses derniers films. 5 histoires de famille et d’amour, dans des styles très différents, qui serviront de tremplin à la discussion et au cocktail qui suivront leur projection.

Un bled paumé de Roumanie, traversé par une voie ferrée et dirigé par un despote municipal. Un train de l’OTAN, plein de militaires américains, qui passe, en route vers le Kosovo déchiré par la guerre. Voilà le cadre de California Dreamin’, dont le titre original (Nesfârcit, soit « sans fin » en roumain) résume le cauchemar ubuesque du convoi militaire, dans un village à tendance schizophrénique et procédurière, où l’on rêve pourtant de l’Amérique. Le prometteur Cristian Nemescu, est mort dans un accident de la circulation à Bucarest avant la présentation de son film au Festival de Cannes 2007, qui lui accorda le Prix Un Certain Regard. Il en portait un effectivement, tant sur son pays que sur le cinéma, et Fabien Baumann, rédacteur chez Positif, reviendra sur le parcours éclair de cette étoile filante du cinéma de l’est, décédé à 27 ans.

Dino de Laurentiis en avait lui 91 quand la Camarde est venue le cueillir. C’est un bel âge, qui lui a laissé le temps de développer une carrière exceptionnelle, qu’il mena quasi jusqu’à sa fin, porté par son flair, son courage et son panache. Fils d’un fabriquant de pâtes, le jeune Agostino est d’abord comédien avant de donner les moyens à la renaissance du cinéma italien de l’après-guerre. On lui doit notamment Riz Amer, dont il épousa la vedette (Silvana Mangano),et La Strada, qui révéla Fellini, Giulietta Masina et fit d’Antony Quinn une star mondiale. Dino produisit un peu en France, notamment Pierrot le Fou de Godard, sous la houlette aussi de Georges de Beauregard, avant d’émigrer aux USA et de faire tourner (entre autres) les plus grands Sidney : Lumet pour Serpico et Pollak pour Les Trois Jours du Condor. Mais l’éclectique De Laurentiis n’oubliait pas la vieille Europe, et y revint parfois pour la bonne cause, comme celle de Bergman, dont il produisit l’Œuf du Serpent en 1977. Alternant blockbusters et films ambitieux, succès et échecs, il eut aussi a cœur, grâce à L’Année du Dragon, de ressusciter Cimino, après l’échec de La Porte du Paradis.
Ces portes nous entrainent vers notre autre festival, celui justement des films maudits, thème du dernier album de nos amis d’Armand Colin. L’on pourra y revoir les Rapaces, victimes du perfectionnisme de Von Stroheim, Lola Montes, chef d’œuvre incompris et malmené de Max Ophuls, les Amants du Pont Neuf, cauchemar de producteur de Leos Carax, les perturbés Désaxés, de John Huston, et le tronqué Que Viva Mexico, unique et malheureuse expérience américaine du grand Eisenstein.
Et aussi au programme : quelques films de Richard Fleischer, dont le Voyage Fantastique d’une équipe scientifique miniature au cœur du corps, soutenu par les VikingsSoleil Vertl’Etrangleur de BostonL’Enigme du Chicago Express et l’Assassin sans Visage. S’ajoutent un bon petit Hitchcock, Jeune et Innocent, un autre Fellini, la Dolce Vita, plus une sélection des meilleurs rôles de Burt Lancaster, pour annoncer la ressortie sur nos écrans de The Swimmer : Le Vent de la Plaine de Houston, Les Tueurs de Siodmak, Jugement à Nuremberg de Kramer, La Flèche et le Flambeau de Tourneur, Les Démons de la Liberté de Dassin, Elmer Gantry de Brooks, et le Prisonnier d’Alcatraz de Frankenheimer.
Sans oublier l’Enfance de l’Art avec le film Wall-E dimanche à 14h.

Bonne semaine.

Isabelle Gibbal-Hardy et l’équipe du Grand Action