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L'Édito

La rengaine de la fin du monde.

L'Édito

La rengaine de la fin du monde.

Chères spectatrices, chers spectateurs,

Comme nous le rappelle notre cycle Dernières séances avant probable fin du monde, l’apocalypse approche. A moins que vous ne vous soyez exilé à Bugarach, village des Pyrénées où se sont réfugiés autant de naïfs que de journalistes, vous n’y échapperez pas. Mais rassurez-vous, l’annonce de la fin du monde est une rengaine, une promesse répétée à l’envi, souvent sans fondement. En revanche, Rengaine, long métrage étonnant signé Rachid Djaïdani, ne manque pas de fond. Alors ne ratez pas la projection de mercredi 14h, en la présence de deux comédiens du film, Kamel Zouaoui et Youssef Diawara. Formé à l’école de la rue et sur la scène de Peter Brook, Rachid Djaïdani livre un premier film dynamisant sur le communautarisme et le vivre ensemble. Rengaine est le premier de nos trois événements de la semaine, sur laquelle règne toujours Piazza Fontana, dernier opus de Marco Tullio Giordana. Ainsi, jeudi, L’Inserm fait son Cinéma avec Pour Lui, la chronique de la fin d’une vie filmée avec beaucoup de sensibilité par Adreas Dresen. Un passionnant débat, animé par Anne Vincent-Salomon, médecin-pathologiste, et Hervé Fridman, Directeur du Centre de Recherche des Cordeliers, suivra la séance. Tout autre genre le lendemain pour le Festival Les Insensés passent à l’Action, co-organisé avec les Editions Wombat autour de l’humour noir et grinçant. La séance sera un hommage à Robert Benchley, drolatique chroniqueur, acteur et scénariste américain des années 20 à 40. Pour saluer la mémoire de cet humoriste un peu oublié de nos jours, on vous le concède, Les Insensés et le Grand Action ont choisi Bad Santa, réalisé par Terry Zwigoff et co-écrit par les frères Coen. Cette histoire d’un Père Noël cambrioleur est « vraiment barzingue » comme le dit Christophe Lemaire, journaliste à Rock’n Folk qui viendra présenter la séance et poursuivre l’échange lors du cocktail qui suivra.

Mercredi 12 décembre, il y aura 33 ans jour pour jour qu’une bombe explosait dans la Banque Nationale d’Agriculture de la Piazza Fontana, au cœur de Milan. Marco Tullio Giordana, cinéaste historien de l’Italie contemporaine (magnifiquement peinte dans Nos plus belles Années), renoue ici avec le thriller politique à la Rosi. Avec une méticulosité qui honore son propos, Giordana suit les multiples pistes de ce terrible attentat qui fit entrer son pays dans une décennie d’horreur terroriste. Il faut s’accrocher au début du film où, comme dans un documentaire, le réalisateur se montre didactique en présentant les personnages et les lieux. Mais cette précision est liée à la complexité de l’affaire qui, après toutes ces années, n’a jamais été vraiment élucidée. Giordana n’apporte pas de vérité absolue, mais, une fois le film terminé, il nous laisse dubitatif sur la conduite de la politique dans son pays. D’ailleurs, comme un écho à ces turpitudes, Silvio Berlusconi annonce son retour à la vie publique.

Voilà un enchaînement rêvé pour évoquer la fin du monde (probable) et les dernières séances que nous vous proposons pour terminer en beauté. Ce n’est pas vraiment le cas dans La Route, de John Hillcoat d’après le noir roman de McCarthy, ni dans Le Monde, la Chair et le Diable, un étonnant film vintage de Ranald MacDougall, où l’apocalypse n’est pas très rigolote. Idem pour The Hole, de Tsai Ming-Liang, où règnent épidémie et pluie noire, Kaïro, de Kiyoshi Kurosawa, où le suicide d’un informaticien annonce le pire, et même Melancholia, de Lars von Trier, dont l’humour et la sublime plastique ne peuvent faire oublier que tout pète à la fin. Avec une poésie plus légère, les frères Larrieu nous en donnent leur vision dans Les Derniers Jours du Monde, tout comme Kathryn Bigelow dans Strange Days. Le New Rose Hotel d’Abel Ferrara complète ce cycle. Mais Ferrara sera la vedette absolue de cette thématique dès mercredi prochain avec son dernier film 4:44, Dernier Jour sur la Terre qui, justement, parle de ça. Vous aurez, selon les Mayas, 48 heures pour le voir.

Egalement à l’affiche cette semaine, Fear and Desire, que ne doivent pas manquer les fans de Stanley Kubrick, dont ce premier film était inédit en France. Une heure d’errance militaire dense, qui annonce le génie à venir, tant dans les thèmes que dans la forme. A voir aussi Looper, un thriller futuriste flippant et bien scénarisé de Rian Johnson, et notre séance de l’Enfance de l’Art. Ce bon vieux Hitchcock est à l’honneur avec Une Femme Disparaît.

Bonne semaine.

Isabelle Gibbal-Hardy et l’équipe du Grand Action