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L'Édito

Inspirations Shutteriennes.

L'Édito

Inspirations Shutteriennes.

Chères spectatrices, chers spectateurs,

D’où vient l’inspiration ? Cinéphile avant d’être cinéaste, Martin Scorsese a une culture de l’écran qui pourrait faire pâlir plus d’un critique. Pour mieux comprendre son dernier film, Shutter Island, le Grand Action s’est penché sur les œuvres qui l’avaient inspiré. Ainsi, notre programmation Au Large de Shutter Island se poursuit cette semaine, avec l’arrivée de nouveaux films signés Milos Forman, Robert Wiene et Samuel Fuller. Rien que ça !

Shutter Island, troublante enquête du marshal Leonardo DiCaprio sur l’asile pénitentiaire d’une île au large de Boston, est un huis clos. On ne sort de l’île qu’en rêves, visions, cauchemars, souvenirs, fantasmes. Nul ne peut véritablement s’échapper de cet hôpital carcéral. Alors où est passée la détenue disparue ? Est-elle vraiment folle ? Existe t-elle seulement ? Voilà pour l’intrigue de ce thriller psychologique, voire psychiatrique, qui mélange le vrai et le faux, le bon sens et la folie avec une délectation scorsesienne qui secoue le spectateur.
Pour pénétrer le monde des fous, Scorsese s’est inspiré de trois films indispensables. D’abord Vol au-dessus d’un Nid de Coucou, de Milos Forman, bouleversante vision sur la folie et l’enfermement. Couronnée par 5 Oscar en 1975, cette plongée sans retour d’un délinquant dans un hôpital psychiatrique tenue d’une main de fer par une infirmière (Louise Fletcher, impressionnante), offrit à Jack Nicholson l’une des plus incroyables prestations. Autre plongée dans l’internement psychiatrique, celle volontaire d’un journaliste ambitieux qui veut enquêter sur un meurtre. C’est Shock Corridor, coup de poing tourné en 10 jours par Samuel Fuller, et c’est une claque. Les exégètes retrouveront dans le film de Fuller la violence apocalyptique de l’orage qui balaie l’île de Shutter chez Scorsese. Le Cabinet du Docteur Caligari est le troisième nouveau film de notre programmation. Réalisé en 1919 par Robert Wiene, ce film clé de l’expressionnisme allemand aux images stupéfiantes de beauté, met en scène la dérive mortelle d’un psychiatre qui instrumentalise un patient. Il nous permet donc de revenir sur l’ambiance que Scorsese a voulu donner à Shutter Island. Un délicieux cocktail gothique et baroque, angoissant comme une bonne série B des années 40. Et des bonnes séries B, à cette époque, il y en avait des tonnes. Les films de Jacques Tourneur, le bien nommé, par exemple. Tourné avec 3 francs-6 sous (130 000 $ en fait), La Féline en rapporta plus d’un million à la RKO et à Val Lewton, le producteur. Signalons, dans ce magnifique film en noir et blanc, la présence de deux français : Tourneur d’abord, et la belle Simone Simon, héroïne de la Bête Humaine, réfugiée, comme le réalisateur, en Amérique. Cinéaste méconnu (sauf des vrais cinéphiles), Tourneur réalisa aussi Vaudou , l’histoire d’un envoutement, et La Griffe du Passé, plus connu sous le nom de Pendez-Moi Haut et Court, un polar sombre, très sombre. Toujours dans le registre de la série B à l’affiche cette semaine, deux œuvres de Mark Robson, comme la Septième Victime, et l’Île des Mort, plus deux films noirs signés par de grands noms qui faisaient alors leurs classes : Feux Croisés, d’Edward Dmytryk et La Maison dans l’Ombre, de Nicolas Ray.

Remercions enfin l’Enfance de l’Art qui nous propose l’Enfant Sauvage, de et avec François Truffaut. Il y interprète un médecin humaniste du XIXe siècle, qui s’intéresse à un enfant trouvé et élevé dans la forêt. Alors que tout le monde considère le rejeton comme une bête, le docteur-réalisateur Truffaut voit en lui un être humain. Magnifique héros de ce film sur l’enfance, à voir des 8 ans, Victor est l’un des ancêtres d’Antoine Doinel.

Bonne semaine.

Isabelle Gibbal-Hardy et l’équipe du Grand Action